Vous avez été nombreux lors du congrès de Clermont-Fd a avoir assisté à la présentation de Jacques KEMP, vous pouvez retrouver la synthèse de son intervention en cliquant sur l’image ci-dessous.
Dans le contexte actuel, avec les problèmes que nous rencontrons, tant que nous aurons des pertes massives de colonies d’abeilles dues aux intoxications, l’apiculture ne s’en sortira que si les apiculteurs continuent leurs efforts pour produire de nouveaux essaims afin de maintenir leur cheptel. La simplification de l’élevage des reines est une clé majeure pour atteindre ce but.
Pour élever des reines, plusieurs éléments sont à prendre en considération. A partir de quoi élever ? Quelle méthode
d’élevage adopter ? Comment prélever les larves ? Comment suivre facilement la fécondation des reines avec un matériel
bien adapté ? Aujourd’hui, je traiterai surtout des deux derniers éléments.
A partir de quoi élever ?
Il est évident, pour faire simple, que l’on élève à partir des meilleures colonies. De préférence productives, douces, tenant
bien le cadre, bonnes nettoyeuses…
Quelle méthode d’élevage adopter ?
Vous avez plusieurs méthodes bien décrites dans les articles de la revue et dans les livres. Je vous ai présenté une
méthode simplifiée d’élevage dans Abeilles et Fleurs de Juillet-Août 2013 pour élever dans les hausses. Maintenant, revenons aux deux points que je trouve les plus importants car d’eux dépendent la valeur des reines obtenues.
Comment prélever les larves ?
Le prélèvement des larves est ce qui rebute le plus les débutants
Le gros problème est de bien voir les larves du bon âge à prélever, et surtout comment les reconnaître. Ce n’est pas, d’ailleurs, le problème des seuls débutants. La vue baissant avec l’âge, des éleveurs confirmés finissent par avoir de grosses difficultés pour voir les larves, et malheureusement c’est devenu mon cas.
Pour pallier à cette anomalie, je me suis attaché depuis plusieurs années à trouver le moyen de simplifier la prise des larves. Il faut dire que des systèmes existent depuis quelques années pour éviter le passage par la case « greffage », ce n’est pas moi qui ai tout inventé.
Le premier système qui a vu le jour dans les années 80-90, le génial boîtier Jenter, inventé par Karl Jenter, d’Allemagne. C’est lui qui a ouvert la brèche pour la prise de larves sans greffage. Puis est venu le Cupularve Nicot et par la suite un système Néo-Zélandais, Easy-Queen.
Depuis quelques années j’ai mis au point un autre système simple ; en prenant ce qu’il y a de mieux dans les trois existants, que j’ai modifié et simplifié, en y apportant mes propres idées.
Chose non négligeable dans tous ces systèmes, on évite le greffage. J’avais fait un jour la réflexion suivante à
Jean Scrive, éleveur professionnel de reines, qui a dispensé ses connaissances en formant des apiculteurs à l’élevage de
reines dans toute la France, qui a écrit pendant des années dans cette revue et à qui nous devons beaucoup, en lui disant :
« ce qu’il y a d’aberrant dans l’élevage tel que nous le pratiquons et qui cependant marche bien quand même, c’est que nous enlevons une jeune larve du premier jour, de quelques heures, de son milieu équilibré en nourriture adaptée à son âge pour la transférer dans une cupule artificielle. Ce transfert se fait soit à sec, soit en la plaçant dans un succédané de bouillie larvaire, un mélange de gelée royale de larve du troisième jour diluée dans l’eau. Il avait acquiescé en souriant.
Imaginons si l’on fait de même avec un bébé humain de deux ou trois jours à qui on enlève brusquement le lait maternel et en lui substituant l’alimentation d’un enfant de deux ans. Pas sûr que cela se passe super bien !…
Le système que j’ai mis au point consiste à avoir un boîtier nid d’abeilles en plastique avec des alvéoles déjà construites sur 3,5 mm de haut que les abeilles finissent rapidement d’étirer (comme avec le Baticadre Nicot). La reine a un contact
direct sur la cire. Le fond des alvéoles est percé sur toute la surface, soit sur un diamètre de 5 mm. Des petits plots à
surface creusée d’une petite cuvette forment le fond des alvéoles, elles sont solidaires d’une fine barrette et viennent
boucher une alvéole sur deux sur une ligne de 10 alvéoles, cette barrette de 5 plots est la pièce maîtresse du système car elle va suivre pendant tout le processus d’élevage, de la ponte de la reine à la récupération des cellules royales prêtes à l’emploi ; deux barrettes posées l’une contre l’autre bouchent toute la ligne. Comme le système NZ, mais là toute la surface du fond des alvéoles est amovible.
De ce fait toute la gelée royale de la larve accompagne cette larve lors du transfert.
Si vous voulez, c’est une combinaison entre le Cupularve et l’Easy-Queen. La grande différence qu’il y a entre mon
système et les autres systèmes ; dans mon système l’intervalle entre les alvéoles est de 7 mm, entraxe naturel existant pour les alvéoles de mâles, mais les alvéoles ont un diamètre intérieur de 5mm au fond. Ce qui m’a permis d’avoir un entraxe de 14 mm entre les cellules royales en élevage et de pouvoir les séparer beaucoup plus facilement pour les utiliser. Ce modèle d’alvéoles d’ouvrières avec grosses cloisons existe au naturel dans les ruches quand les abeilles rétrécissent des alvéoles de mâles, et cela ne dépayse pas les ouvrières ni d’ailleurs la reine.
Ce qui pouvait être un reproche fait aux différents systèmes, d’avoir besoin de beaucoup d’accessoires pour réussir à
élever, là, je l’ai simplifié au maximum.
Une fine barrette de 5 plots qui prend place dans une fente de la barrette d’élevage en bois classique que l’on utilise habituellement, des cupules percées qui s’emboîtent sur les plots des fonds d’alvéoles et éventuellement des portecupules souples, et voilà tout.
La larve ne subit aucun transfert brutal, elle suit sans traumatisme et se retrouve au fond d’une cupule d’élevage, et surtout, elle n’a pas changé de régime alimentaire.
Au départ la reine est enfermée avec grille à reine dans le boîtier, le contact avec la cire ne la dépayse pas des masses. En 3 à 4 heures elle a pondu dans les 100 alvéoles mises à sa disposition.
Quand le boîtier a servi plusieurs fois, en une heure et demie maximum c’est pondu.
On connait la date et l’heure approximative de la ponte, donc au quatrième jour on a des larves au top pour les mettre en
élevage. Même si au départ, 100 œufs sont pondus, au quatrième jour quelques larves manquent à l’appel, comme dans un cadre de couvain où quelques trous apparaissent.
Plus la peine d’avoir une vue excellente pour reconnaître les bonnes larves, là elles sont toutes bonnes, et elles sont faciles à transférer.
Les fines barrettes de plots contenant les larves sont enlevées par l’arrière du boîtier, elles sont placées dans la fente de la barrette d’élevage en bois et les plots sont coiffés avec les cupules percées.
Ce système convient pour lancer au maximum environ 80 à 90 élevages à la fois, mais qui peut le plus peut le moins, et est adapté aux apiculteurs qui veulent faire leurs propres reines.
Je vous ferai un autre article dans quelque temps concernant un autre système à 720 alvéoles que j’ai mis au point et plus
particulièrement adapté à la production de gelée royale et à de plus grandes séries de reines.
Comment suivre facilement la fécondation des reines avec un matériel bien adapté ?
Autre point primordial en élevage des reines, le suivi des fécondations des reines. Car c’est le point le plus important à mon avis.
Obtenir des reines de qualité passe par le contrôle de sa capacité à produire un beau couvain, preuve d’une bonne fécondation. A quoi bon produire des « brêles », autant ne rien faire du tout. Pour cela l’utilisation d’une ruchette de fécondation bien adaptée est très importante. Dans Abeilles et Fleurs de février 2010 je vous avais fait un article
sur l’hivernage des mini-colonies et vous avais décrit une ruchette que j’ai bien améliorée depuis.
Ruchette de fécondation 6 cadrons ½ cadre de hausse Dadant en polystyrène expansé de haute densité, corps de 272 x 272 x 170 mm avec parois de 20 mm. C’est l’un des standards le plus utilisé en élevage de reines et celui qui donne le plus de satisfaction.
Cette ruchette est livrée complète avec les 6 cadrons, une cloison permettant de couper le volume en deux, un nourrisseur cadre, des crémaillères plates, nouveau système d’espacement des cadrons permettant d’avoir les avantages des cadres Hoffmann sans les inconvénients, les cadres glissent, seul un débordement de 1,5 mm maintient les cadrons en place, un petit créneau dans chaque crémaillère permet le passage de la cloison dans sa fente, les portières et les aérations.
Les + par rapport aux autres ruchettes :
- 1 calendrier d’élevage gravé sur le couvercle
- 1 cloison pouvant glisser dans des rainures prévues à cet effet sur les 2 faces de la ruchette, permettant de
passer d’une ruchette de 6 cadrons à 2 compartiments de ruchette de 3 cadrons chacun avec 2 sorties
opposées bien distinctes - 2 crémaillères « plates » permettant de positionner les cadrons à l’espacement requis, mais permettant un glissement des cadrons comme les cadres Hoffmann, facilitant ainsi les manipulations lors des visites. Ces crémaillères se fixent à la colle Scotch Gel ou similaire.
- 6 cadrons en plastique alimentaire avec 4 trous chacun pour le passage des fils afin de maintenir les cires gaufrées. Les cadrons ont des côtés avec un profil en « T » suffisamment résistants, l’épaisseur de ces côtés de 2 mm permet un gain important de la surface utile des cadrons ; environ 20% par rapport à un cadron en bois et environ 18% par rapport à un cadron Nicot.
- Ce surplus de surface utile fait gagner l’équivalent d’environ 1,50 cadron en bois ou 1,25 cadron Nicot sur une ruchette 6 cadrons. Etant donné la place occupée par le couvain et le pollen, cela permet d’augmenter facilement de 30 à 35 % la possibilité de stockage des provisions hivernales de miel. D’autre part, les jeunes reines disposent de plus de place pour étendre leur ponte, ce qui permet de se rendre mieux compte de leur valeur.
- 1 nourrisseur cadre en plastique alimentaire permettant à chaque fois que nécessaire de nourrir la ruchette. Une fois les provisions et le couvain suffisants en début de saison d’élevage, on peut remplacer le nourrisseur par un cadron et placer la cloison afin d’obtenir 2 compartiments distincts de 3 cadrons avec 2 sorties opposées, ce qui permet de mettre 1 cellule royale par compartiment et de pouvoir compter après naissances sur 2 reines mises en fécondation dans la même ruchette.
Une fois les reines nées, il n’y a plus qu’à attendre qu’elles se fassent féconder.
Une fois de retour à la ruchette, il faut attendre qu’elle commence à pondre.
Quand on commence à voir du couvain operculé d’ouvrières, et des belles plaques de ce couvain. Les reines ont fait la preuve de leur valeur. Elles peuvent être marquées, à la peinture, ou avec pastille numérotée.
Cette ruchette est utilisée pendant toute la saison d’élevage des reines comme ruchette de fécondation à 1 ou 2 compartiments. Mais on l’utilise à 1 seul compartiment 5 cadrons et 1 cadrenourrisseur dès la fin de la saison d’élevage des reines. Elle est nourrie par petites doses au sirop pour faire développer la population puis par nourrisseurs complets pour l’amener à 4,5 – 5 Kg vers mi-octobre pour la mise en hivernage.
Jacques Kemp